La plupart des réseaux sont constitués en asbl par la loi de 2019. Comme c'est le cas du RHN qui regroupe les 6 agréments des 6 hôpitaux de la région namuroise (cf. encadré). Le coordinateur de réseau doit s'occuper de la gestion journalière de l'asbl.
« La description de mon travail est très claire: créer les conditions de construction et de collaboration entre les 6 hôpitaux dans le réseau. Je fais partie du conseil d'administration du réseau et du bureau du réseau avec comme mission de réunir et de dynamiser, tous les 15 jours à tous les mois, une réunion avec les directeurs généraux et les directeurs médicaux. Je sollicite aussi, 1 à 2 fois par an, un comité de concertation de réseau composé des présidents des conseils médicaux, des médecins en chef et du bureau du conseil d’administration du réseau. »
Ne soyons pas trop ambitieux dès le départ, les réseaux sont complexes. Mon rôle est de dynamiser tout cela. Étant dans l'asbl, j'ai l'autonomie de fonctionnement et je rapporte au conseil d'administration du réseau. Je pense que la gouvernance de réseau relativement dynamique, telle qu'organisée d’emblée volontairement à Namur, est un peu unique
De plus - et beaucoup plus important selon lui - il a proposé au conseil d'administration l'élaboration d'un plan stratégique pour le réseau. Aujourd'hui ce plan est en préparation par l'organisation d'un séminaire d'orientation stratégique.
« Ne soyons pas trop ambitieux dès le départ, les réseaux sont complexes. Mon rôle est de dynamiser tout cela. Étant dans l'asbl, j'ai l'autonomie de fonctionnement et je rapporte au conseil d'administration du réseau. Je pense que cette gouvernance de réseau relativement dynamique, telle qu'organisée d’emblée volontairement à Namur, est un peu unique. Tous les réseaux n'utilisent pas la possibilité de cette gouvernance de réseau, au-dessus des gouvernances de chaque hôpital participant. »
La fonction de coordinateur de réseau est nouvelle pour le monde hospitalier, mais pas pour Serge Hubert qui, pendant toute sa carrière, s'est spécialisé en «corporate governance, people governance, merger and acquisitions», d'abord comme associé chez Deloitte et KPMG, avec ensuite une expérience dans le milieu médical hospitalier pendant presque 10 ans (comité de direction du CHR de Liège et ressources humaines au CHU de Liège).
Lorsqu'on parle de gouvernance, les hôpitaux sont les structures les plus complexes dans le paysage de la santé, avec à la fois des textes juridiques complexes qui évoluent en permanence, beaucoup de métiers différents qui doivent travailler ensemble, un fonctionnement continu avec des chaînes d'approvisionnement (supply chain) humain, médical et logistique sans relâche.
« J'ai accepté le poste parce que c'était un défi complexe: les 24 réseaux se bâtissent très progressivement et chaque réseau a un costume un peu différent. Prenons l'exemple d'Anvers, avec la fusion du ZNA et du GZA (cf. numéro précédent de hospitals.be), où le leadership est fort avec une vision et un plan, appliqués de manière rationnelle, et un esprit d'équipe relativement fort.
La culture des partenariats dans les hôpitaux est très importante et une de mes tâches consiste d'ailleurs à arriver à développer progressivement une culture de partenariat, mais cela prend du temps. Le principe n'est pas nouveau: dans l'industrie on parle déjà depuis 20 ans du collaboratif. Dans le milieu hospitalier, aujourd'hui, nous rencontrons plutôt des difficultés: la nouvelle loi du 28 février 2019, publiée le 28 mars 2019, concernant le réseautage clinique entre hôpitaux, s'ajoute à la loi hospitalière de 2008
Mais les 2 lois ne se parlent pas nécessairement bien et sont même parfois contradictoires. De ce fait, le milieu hospitalier se retrouve avec une gouvernance à deux niveaux. Il faut les faire cohabiter. Ici dans le RHN, nous le ressentons très fort. Dans le conseil d'administration du réseau il y a des représentants des conseils d'administration des 6 hôpitaux membres du réseau.
Il y a aussi, en parallèle, les conseils d’administration des hôpitaux. Mais ce sont deux niveaux de fonctionnement différents et souvent ce que la loi de 2008 impose ne peut pas être modifié, même si la loi de 2019 le demande. Mais je trouve passionnant de travailler dans ce domaine. »
La particularité du réseau namurois (comme Vivalia) - et c'est unique en Wallonie - est que le réseau couvre avec les 6 hôpitaux l'ensemble d'une province de plus ou moins 500.000 habitants.
Le défi pour les réseaux sera de trouver un modus operandi équilibré, en d'autres termes, d'arriver à une négociation équilibrée, et c’est alors qu’entreront en jeu les capacités de leadership du réseau à trouver un consensus.
La particularité du réseau namurois (comme Vivalia) - et c'est unique en Wallonie - est que le réseau couvre avec les 6 hôpitaux l'ensemble d'une province de plus ou moins 500.000 habitants. Comme d'autres réseaux, le RHN comporte des hôpitaux publics et des hôpitaux privés - mais la loi a réglé depuis longtemps cette collaboration.
Selon Serge Hubert, la difficulté pourrait venir du fait que les hôpitaux du RHN ont plus ou moins tous la même taille et historiquement les mêmes spécialités loco-régionales, avec environ le même nombre de lits (200-350), tandis que le fait d'avoir un hôpital universitaire dans le réseau peut être un atout
« La difficulté dans l'application de la loi de 2019 ne viendra pas tellement de la taille de l'hôpital mais de la manière dont la loi va nous imposer de fonctionner. L'AR du 21 juillet 2022 concernant la stroke unit (S2) donne 3 ans pour satisfaire à l’ensemble des critères de l’agrément. Nous savons aussi que pour certains soins loco-régionaux la loi nous demande de nous organiser de manière rationnelle et complémentaire. Mais elle n'en dit pas plus.
Le défi pour les réseaux sera donc de trouver un modus operandi équilibré, en d'autres termes, d'arriver à une négociation équilibrée, et c’est alors qu’entreront en jeu les capacités de leadership du réseau à trouver un consensus. »
L'AR du 21 juillet 2022 précise également qu'il faut en plus respecter la proximité : 90% de la population de patients potentiels doit pouvoir être servie en mission de soins dans les 30 minutes. Ce qui nécessite l’élaboration d’un plan médical de réseau concerté et efficace.
« À ma connaissance, il ne doit pas y avoir beaucoup de plans médicaux de réseau finalisés pour l'instant, en revanche, des plans stratégiques de rapprochement oui, et le partage que j'ai avec les autres réseaux me fait comprendre que le monde médical en soi est souvent beaucoup plus rapide à proposer des solutions que le monde managérial parce que les logiques sont différentes.
La difficulté d'un gestionnaire d'hôpital est d'arriver à équilibrer l'ensemble de l'équation (le médical et le budgétaire), tandis que le médical pensera d'abord à la rationalité de l'offre aux patients et de l'avantage aux patients. Le management a ce même objectif évidemment, mais il a la contrainte supplémentaire que, in fine, l'hôpital doit survivre financièrement. Et cela vaut pour 1 hôpital, mais dans notre réseau il y en a 6, ce qui multiplie le challenge par 6 ! »
En toute logique, Serge Hubert prépare dès lors un séminaire d'orientation stratégique avec les différents directeurs généraux. Le but est de déterminer les grands axes d'un plan stratégique de réseau, les orientations qui s'offrent au RHN. Pour ce faire, le plus important est l'analyse de ce qui existe aujourd'hui: quel type de réseau sommes-nous? quelles sont les activités transversales qui fonctionnent bien? quel profil de réseau voulons-nous avoir?
La difficulté d'un gestionnaire d'hôpital est d'arriver à équilibrer le médical et le budgétaire.
L'AR du 21 juillet 2022 précise également qu'il faut en plus respecter la proximité : 90% de la population de patients potentiels doit pouvoir être servie en mission de soins dans les 30 minutes. Ce qui nécessite l’élaboration d’un plan médical de réseau concerté et efficace.
La réforme du financement des hôpitaux (planifiée pour 2025-2028) imposera une utilisation correcte des ressources et une justification des coûts. L'AR du 21 juillet 2022 fixe un ensemble de contraintes. Par conséquent, tout le monde ne pourra plus tout faire.
« Pour les soins loco-régionaux un "hospital agreement" suffira et pour le suprarégional il faudra un "legal agreement". Par exemple, la chirurgie cardiaque (B3) ou les cancers rares "tête-cou" et "ovaires" seront un enjeu pour chacun. La responsabilité de la coordination du réseau est d'accompagner les gens dans une grande réflexion de gouvernance, de les mettre dans une dynamique, une culture de partenariat d'une nouvelle gouvernance, sachant que chaque patron - de par la loi de 2008 - est toujours patron chez lui. Rien ne peut lui être imposé, les niveaux fédéral et régional étant les seuls à pouvoir imposer.
L'enjeu est la qualité des soins de santé à la population parce que le réseau hospitalier devient le réseau de santé: les hôpitaux s'ouvrent et les challenges de demain sont l'hospitalisation à domicile, une meilleure relation avec la première ligne et les maisons de repos… vers un écosystème de santé. Voilà le grand challenge des réseaux.
La loi de 2019 n’inclut pas les hôpitaux psychiatriques. « Nous avons toutefois des projets et des relations avec les hôpitaux psychiatriques. La santé mentale, dans les suites de la crise COVID, est très importante et pas uniquement dans les hôpitaux, mais surtout dans l'écosystème de santé. »
La loi permet aux réseaux de collaborer entre eux, ce qui est important pour le patient. Si un réseau n'est pas le centre de référence pour une pathologie, mais que c'est le réseau voisin, des collaborations et des conventions de collaboration (avec trajet patient) peuvent être établies. Par exemple pour les soins aux grands brûlés.
2k
1.938 lits agréés, dont 300 lits universitaires
8k
8.592 collaborateurs
83k
83.330 admissions en hospitalisation classique
42k
42.447 admissions en hospitalisation de jour chirurgicale
1M
990.631 consultations médicales
La Clinique Saint-Luc à Bouge
Le CHU UCL Namur
avec trois sites: Dinant, SainteÉlisabeth (Namur) et Godinne (Yvoir)
le CHR Sambre & Meuse
avec deux sites: Meuse (Namur) et Sambre (Sambreville)
Le Foyer Saint-François à Namur
profils non médicaux
8 polycliniques et centres médicaux
Andenne, Auvelais, Ciney, Erpent, Gembloux, Givet, Namur et Perwez
Dans la loi de 2019 il est clairement établi que l'autonomie de gestion reste dans les hôpitaux. Cependant - autre exemple de paradoxe - pour être agréé un hôpital seul doit avoir une pharmacie, la nouvelle loi réseau dit que, si on se met en réseau, il faudrait rationnaliser, mais on ne peut pas fermer une pharmacie au risque de perdre son agrément (loi de 2008). Ce qui ne veut pas dire que les pharmacies ne peuvent pas collaborer…
« Je pense qu'il y a vraiment une réflexion à organiser entre tous les réseaux sur cette gouvernance à deux têtes parce qu'il y a un nouveau modèle à définir. Aujourd'hui, il nous manque un code de gouvernance de réseau hospitalier car la gouvernance santé, la gouvernance logistique et la gouvernance humaine forment un vaste ensemble. Et encore le RHN est un réseau moyen parmi les réseaux – 9.000 personnes -, le problème est forcément plus prononcé pour les grands réseaux. »
« En Belgique, il y a un important problème d'effectifs et de gestion d'effectifs. Une solution appliquée dans les nouveaux modèles de gouvernance - et c'est tout à fait possible, même favorable, dans les milieux hospitaliers - est la mobilité professionnelle, par exemple des métiers non médicaux logistiques. Un plan stratégique à 10 ans pourrait par exemple planifier la transformation professionnelle du surplus en électriciens pour combler le manque de clarckistes dans 5 ans. »
Une réflexion concernant l'efficacité d'une offre de soins de ville et l'efficacité d'une offre de soins de proximité à l’échelle provinciale doit être menée.
Si un réseau n'est pas le centre de référence pour une pathologie, mais que c'est le réseau voisin, des collaborations et des conventions de collaboration (avec trajet patient) peuvent être établies. Par exemple pour les soins aux grands brûlés.
Une autre réflexion qui doit être menée concerne l'efficacité d'une offre de soins de ville et l'efficacité d'une offre de soins de proximité à l’échelle provinciale. Une des premières réussites du RHN est une convention pour un réseau hématologique namurois au profit du patient. Elle stipule des consultations d'hématologie dans tous les hôpitaux, des hospitalisations de jour dans certains hôpitaux et des hospitalisations aiguës dans un hôpital spécialisé.
L'offre de l'hématologie à Namur a donc été rationalisée. Cette nouvelle convention vient d'être signée au niveau du réseau et doit maintenant être mise en œuvre en pratique. « C'était, d'une part, logique à réaliser et, d'autre part, une opportunité au niveau médical, puisque le bon sens fonctionnait déjà, et le réseau est venu formaliser la pratique.
La même chose devrait pouvoir se faire dans le cadre de la gériatrie. Cependant, pour tout ce qui touche aux soins suprarégionaux, il y aura des choix à faire et des décisions vont s'imposer. Tout sera une question d’équilibre: le plan médical d'un réseau est un équilibre, chaque hôpital a des spécialités, des points forts et, historiquement, des spécialistes qui se sont concentrés. »