Valida est né en 2008 de la faillite de l’Hôpital français, un hôpital général à Berchem-Sainte-Agathe. Une association public-privé a réuni les 64 lits SP et G de l’Hôpital français et les 111 lits du CHAL, le Centre Hospitalier Albert Laurent, qui 1 an auparavant avait signé un accord de partenariat avec les Cliniques universitaires Saint-Luc.
« Valida, la structure ainsi créée dans les locaux de l’Hôpital français, avait alors 175 lits de réadaptation neuro-locomotrice et gériatrique, ce qui en faisait le plus grand centre de ce type dans la région bruxelloise. Aujourd’hui, il y a encore des personnes travaillant à Valida qui se souviennent du traumatisme profond que la faillite a signifié :
Tous les patients hospitalisés ont été transférés vers d’autres structures et l’hôpital a littéralement été vidé. Sur place, la polyclinique a été rouverte pour le support à la population locale. Un certain nombre de personnes ne se sont plus fait soigner durant la période de fermeture…», explique Isabelle Coune. Ensuite, un vaste chantier de rénovation et de modernisation a été entrepris dans les locaux de l’ancien Hôpital français, qui s’est terminé en 2014.
Fusion avec Sanatia
L’hôpital psychiatrique du pôle Sanatia a été créé par la famille Jassogne qui en était propriétaire et gestionnaire jusqu’en 2009. Constatant des difficultés dans la gestion en 2009, les banques ont alors fait appel aux Cliniques universitaires Saint-Luc pour intervenir afin de redresser la barre.
Cependant, en 2014, avec la 6e Réforme de l’État une structure comme Valida ne peut rester une structure hospitalière en tant que telle et doit devenir une entité fédérée, avec un avenir incertain, entre autres concernant le mode de financement.
Le 30 juin 2014, date de l’échéance, il y a un accord entre les différentes parties impliquées dans Valida et Sanatia pour créer une nouvelle structure qui s’appellera Valisana, une asbl de droit privé, le résultat de la fusion de Valida et Sanatia. Avec les trois indices de lits (G, SP et A) présents dans la nouvelle structure, elle répond aux critères pour rester une entité fédérale. Les statuts de Valisana consacrent l’existence de deux pôles au niveau médical, avec la volonté de rendre les services communs transverses.
Valisana fonctionne dès ce moment avec un seul conseil d’administration. Au niveau opérationnel, dans une première phase, le conseil d’administration demande aux deux directions générales et aux deux comités de direction de mettre en place des synergies en ce qui concerne les services communs.
Ensuite, en mai 2017, le conseil d’administration décide d’intensifier le mouvement, et engage à cette fin Isabelle Coune.
Photos Saint-Luc et Valisana
En 2008, Valida était le plus grand centre de réadaptation neuro-locomotrice et gériatrique dans la région bruxelloise
Multidisciplinarité
«L’objectif était de créer un seul comité de direction et des services communs entièrement transverses», précise Isabelle Coune. «Donc, avec un seul service de ressources humaines, un département financier, un département IT, un département technique et logistique… Ce qui est justifié car les exigences auxquelles ces départements sont confrontés augmentent, et pour une petite structure, cela devient très lourd. Les synergies ont du sens.
De plus, nous nous sommes rendu compte qu’au niveau médical, il y a aussi des synergies possibles, les trois indices de lits étant les plus multidisciplinaires qui soient. Pour le travail multidisciplinaire au chevet du patient, il y a pour les trois indices de lits la présence conjointe d’un spécialiste (gériatrie, médecine physique ou psychiatrie) et d’un généraliste, avec en plus des kinésithérapeutes, ergothérapeutes, psychologues, logopèdes, diététiciens, assistants sociaux…
Un pôle apprend de l’autre et inversement. Par exemple, au niveau somatique, le pôle psychiatrique était plutôt faible, mais en 3 à 4 ans les soins somatiques aux patients psychiatriques ont pu être renforcés grâce à la volonté des psychiatres, et aussi à la présence des internistes de Valida; et du côté de Valida on s’est rendu compte que le temps donné à la parole en psychiatrie avait une réelle valeur ajoutée, et on a appris de la façon de Sanatia à placer le patient au centre comme véritable acteur de ses soins. Il y a de nombreux exemples de complémentarité dans les approches, ce qui peut s’avérer très utile. Il y a dès lors continuellement des apports réciproques entre les pôles. »
Mettre les deux pôles dans une seule structure permet des enrichissements au niveau médical et au niveau des soins
Qui sont les patients?
Du côté de Valida, les patients arrivent essentiellement pour une réadaptation via les grands hôpitaux universitaires bruxellois: les Cliniques universitaires Saint-Luc, l’UZ Brussel, l’Hôpital Érasme, le CHU Brugmann. 78% d’entre eux sont bruxellois, 18% viennent de Flandre et 6% de Wallonie, la différence s’expliquant par la localisation de l’établissement au nord de la Région Bruxelles-Capitale. La durée moyenne de séjour en réadaptation est de 40 à 50 jours. Outre les 7 unités de réadaptation neuro-locomotrices et gériatriques, l’hôpital dispose d’un centre de réadaptation ambulatoire.
Les patients arrivent chez Valida avec un déclin fonctionnel important, suite à une maladie ou une opération; tout est mis en œuvre pour parvenir avec les patients à un retour à la plus grande autonomie possible. L’objectif est à chaque fois personnalisé, et défini avec le patient. Deux tiers des patients peuvent ensuite retourner à leur domicile à l’issue de leur séjour à l’hôpital.
Pour l’hôpital psychiatrique, les patients viennent essentiellement du domicile, ou d’une structure du réseau de santé mentale bruxellois. 85% sont issus de la Région de Bruxelles-Capitale, 6% de Flandre et 8% de Wallonie. L’admission est demandée par leur médecin traitant, leur psychiatre ou encore par exemple, par le psychiatre de la maison de soins psychiatriques (MSP) le temps de se restabiliser et de pouvoir revivre de façon sécurisée en dehors de l’hôpital. La durée moyenne du séjour en hôpital psychiatrique est de 20 jours.
Du côté de Valida, les patients arrivent essentiellement pour une réadaptation via les grands hôpitaux universitaires bruxellois
« Haut accueil » en psychiatrie
Le pôle Sanatia se compose de trois entités: un hôpital psychiatrique aigu avec 70 lits, aujourd’hui sur le site Méridien de la Clinique SaintJean à Saint-Josse-ten-Noode (rue du Moulin); une maison de soins psychiatriques (MSP) qui a augmenté son nombre de lits de 68 à 95 aujourd’hui et un centre de jour, Le Canevas, de type psychiatrique aussi, situés tous deux à Ixelles, séparés par une seule maison dans la rue du Collège.
« Nous avons une particularité qu’on peut appeler "haut accueil". C’est-à-dire que par notre structure nous sommes capables d’accueillir des patients avec des pathologies psychiatriques complexes qui ne rentrent pas nécessairement dans des cases, et sans nécessairement avoir programmé l’hospitalisation.
Cette approche, assez unique à Bruxelles, permet dans un certain nombre de cas d’éviter aux patients en crise une mise en observation. Sachant combien l’expérience de la mise en observation peut être traumatisante dans une vie, c’est certainement positif de pouvoir les aider à surmonter la crise sans y avoir recours. Notre structure est ouverte, et sans contention physique. »
L’hospitalisation étant de durée limitée, les patients sont ensuite suivis par leur propre psychiatre ou par un psychiatre de Sanatia. « Nous proposons aussi des hospitalisations scandées – mais nous ne sommes pas les seuls à le faire -, c’est-à-dire des patients viennent passer régulièrement quelques jours à l’hôpital. Ces pauses hospitalières sont rassurantes et permettent à ces patients de vivre en dehors de l’hôpital le reste du temps. »
La MSP de Valisana passera en 2022 de 82 à 95 lits, avec un projet pilote pour mise en autonomie de 13 patients, l’objectif étant de leur donner un maximum d’autonomie pour éventuellement quitter la MSP. «Créée à l’origine comme un lieu de vie qu’on ne quittait plus, on se rend compte maintenant que le séjour en MSP peut n’être qu’un passage, plus ou moins long, et que certains résidents pourront peut-être vivre avec un degré d’autonomie plus important dans un environnement moins encadré, comme une IHP (Initiative d’Habitation Protégée) par exemple, voire même à leur domicile.
Pour l’hôpital psychiatrique, les patients viennent essentiellement du domicile, ou d’une structure du réseau de santé mentale bruxellois
Gestion actuelle
Aujourd’hui, les Cliniques universitaires Saint-Luc sont l’actionnaire principal dans l’assemblée générale (2/3 des sièges). Y siègent aussi l’UCL, la VUB, Epsylon, les Cliniques Saint-Jean, et un membre de la famille Jassogne. Un des grands objectifs de 2021 était d’introduire des administrateurs indépendants dans le conseil d’administration, pour améliorer encore son professionnalisme. Ce qui est chose faite.
Les médecins de Valisana ont tous un statut d’indépendant. Au Centre Hospitalier Valida, ils travaillent l’équivalent d’un temps plein. À la Clinique Sanatia ils sont à mi-temps dans l’hospitalier et l’autre mi-temps dans le réseau de santé mentale.
« Cette répartition représente également une grande force. Un reproche à l’adresse des hôpitaux psychiatriques est d’être hospitalocentrés alors que le parcours du patient psychiatrique dure toute la vie avec des épisodes à différents moments et donc avoir des connexions avec les autres modes thérapeutiques est important. »
En ce qui concerne le personnel infirmier, « nous sommes à flux tendu mais pas critique au point de nécessiter la fermeture de lits par manque de personnel. Dans un marché en pénurie de personnel, dire que nous n’avons pas de problèmes pour trouver du personnel adéquat serait mentir. Cela reste compliqué mais, jusqu’à présent, nous sommes parvenus à avoir des équipes staffées de façon complète en recourant, le cas échéant, à l’intérim. »
Valisana dépend de la COCOM (Commission communautaire commune de Bruxelles-Capitale) et tous les documents officiels ou publics doivent être dans les deux langues. À Valida 10 à 15% du personnel est néerlandophone.
Implication dans le paysage de la santé mentale bruxellois
En tant que structure Valisana est par ailleurs très actif dans le réseau de santé mentale bruxellois. « Nous sommes membres fondateurs de Hermes+ - une des quatre antennes du réseau de santé mentale bruxellois - mais nous avons aussi des connexions fortes avec les antennes Bruxelles-Est et RéZone. Nous participons au comité de réseau régional bruxellois Brumenta, et mettons du personnel à disposition dans une antenne mobile pour Hermes+ et pour Bruxelles-Est. »
Au niveau fédéral, les autorités ont opté pour faire de la Région de Bruxelles-Capitale un seul réseau de santé mentale. Ce qui est énorme. L’avantage du réseau au niveau du patient? « Le réseau permet de meilleurs trajets de soins, avec une prise en charge plus fluide en amont et en aval de ce que chaque membre du réseau peut réaliser à lui seul. »
L’avenir
Un projet de construction commun avec les Cliniques universitaires Saint-Luc est en route. La struc - ture, qui s’appelle pour l’instant Institut de Psychiatrie Intégré, doit voir le jour d’ici 2 ans sur le site de Louvain-en-Woluwe, à côté des Cliniques. Ce bâtiment accueillera la psychiatrie adulte et infantojuvénile de Saint-Luc, et l’hôpital de soins psychiatriques Sanatia. La construction a été mise en route en septembre dernier.
« Nous serons d’abord colocataires avec la psychiatrie de Saint-Luc, tout en cherchant les synergies immédiates là où il y en a, et petit à petit on verra comment évoluer pour un jour ne faire plus qu’une entité au niveau de la psychiatrie», espère Isabelle Coune.
« Quand je suis arrivée à Valisana, les équipes se questionnaient continuellement par rapport à notre avenir; aujourd’hui nous nous concentrons sur des projets qui visent essentiellement à améliorer la qualité et la sécurité des soins, comme l’accréditation par exemple; nous saisissons par ailleurs les opportunités de déve - loppement. Nous avons donc du pain sur la planche, sans oublier la gestion de la pandémie bien sûr.
En progressant dans la qualité de nos prises en charge, et dans la reconnaissance de notre spécificité et de notre nom, nous accomplissons notre mission, et nous devenons meilleurs et plus forts. Aujourd’hui, on nous demande d’être partenaires à différents niveaux, ce qui est une évolution favorable.
Aujourd’hui, on nous demande d’être partenaires à différents niveaux, ce qui est une évolution favorable. Être un partenaire reconnu dans les domaines qui nous concernent à Bruxelles fait plaisir. Ce n’est que par l’excellence des soins, le bouche à oreille favorable, le fait qu’on accueille avec succès des patients en difficulté, que nous pouvons être un partenaire aussi fiable et loyal que possible. »